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mercredi 14 février 2024

Au commencement…



Un bruit se fit entendre dans le sous-bois, peut-être était-ce une branche. Son craquement sec et sonore piqua la curiosité de l’animal. Puis une brise de sud embaumée envahit les haies d’aubépines et tout autour de nous le bruissement léger de la sauvagine, encore indiscernable, s’éleva : tous les habitants, tout le peuple des bois, des piaillements furtifs, un bruit de sabot, des claquements, le chant premier de l’alouette, là-bas ce rapace élevé qui monte, le bourdonnement d’un nid de guêpes, une cloche lointaine qui se fait discrète, et tout à coup, le saut du chevreuil dans les blés mûrs,  et déjà, sous l’horizon rosé, le cri des migrateurs traçant route ver la mer… Je vivais.
 

mardi 13 février 2024

Une rencontre…



Le soleil s’était levé, révélant un miroir mouvant où les arbres  se découpaient en silhouettes solennelles. Le clair matin de campagne  n’avait pas encore  eu le temps d’essuyer sa buée de rosée, et le front des rives était luisant, onctueux, sous la semelle des bottes.

Au long de la berge, là où le renard était venu boire, quelque chose naissait peu à peu, une sensation impérieuse comme pour  un rendez-vous essentiel. Une carpe nerveuse transperça le silence, sa nage était superbe. Il n’était même  pas utile de tenter la lutte, la regarder vivre suffisait amplement à ma félicité.



 

lundi 12 février 2024

Upkik…


Si étrange que cela puisse être, c’est au sommet du Mont qu’il étire ses ailes. À l’ombre de l'abbaye, il veille sur le repos de ceux qui ont, jadis, traversé l’Atlantique pour que l’on puisse s’offrir le luxe d’avoir des états d’âmes.

Harfang des neiges dont la blancheur éclaire ces lieux. Les Inuits t’appellent Ukpik. Il est logique qu’en ces lieux un peu enchanteurs se dresse l’oiseau du petit magicien Harry… 

C’est un endroit de paix, un moment insolite   où se rencontrent finalement deux oiseaux rares. “ Rara avis in terris “ aurait dit Juvénal dans ses Satires, oiseau rare sur la terre…

 Salut L’Harfang, continue de veiller sur la quiétude du Mont, sentinelle des songes, compagnon de nos rêves.



 

vendredi 9 février 2024

Balade "pigmentée"...



La couleur est chaleur, vibration, réconfortant  remède. Elle a tous les droits. Jamais vous ne reproduirez le même ton, si simple soit-il. C’est une des fantaisies de la couleur, elle est toujours insaisissable. Ne vous essayez pas à la maîtrise de la couleur: aussitôt,  elle se carapate plein tubes,  loin des fadeurs.  Jamais vous ne vous lasserez des pigments en attente  dans leurs bocaux, prêts pour raconter une nouvelle histoire dont le sens n’est jamais connu à l’avance. Quelle importance! Les pinceaux sont des bâtons de marche et le support un sentier à parcourir. Il n’est pas utile d’utiliser une boussole, c’est la couleur qui commande…

Le temps, à cet instant,  n'est pas perdu, il n’est tout simplement  pas compté. Nous ne sommes pas dans une dimension prédéfinie… C’est une balade informelle.



 

jeudi 8 février 2024

Cerveau Lent...

 



Respirez! Respirez un bon coup avant d’être ensevelis! Fusionné avec le paysage, vous devenez invisible, et par ce fait, définitivement à l’abri du fléau des enquiquineurs. Le ciel démesuré donne la juste mesure de ce besoin constant de respirer. Sur l’horizon, les bleus se fondent, les bleus vibrent. De jeunes mouettes impertinentes se faufilent tout en  se donnant des airs supérieurs. Vous regardez autour de vous… L’aile de toile du papillon… Un papillon pour de faux, un cerf-volant et un cerveau lent s’unissent le temps d’une marée… L’éternité doit ressembler à ça…



mercredi 7 février 2024

Regard…


Je suis un spectateur fasciné par la diversité. C’est cela, s’étonner sans lassitude… C’est la seule façon de vivre où l’ennui n’existe pas. Considérer la nature et ses innombrables combinaisons, c’est magique. Je suis comme un explorateur de sensations. Ce n’est pas tant le sensationnel que je vise mais plutôt le minuscule détail qui passe inaperçu du plus grand nombre, un arrêt sur image dans le remue-ménage permanent. C’est finalement, depuis toujours, la minuscule  broutille que je cherche. le petit plus qui accroche un sourire au quotidien. Ma méditation journalière, c’est ça.

Chaque jour, un spectateur du monde est accaparé par sa  quête. Par la certitude que cette existence est loin d’être banale, il suffit juste de bien observer.

L’étonnement, c’est la faculté  première de l’enfant que l’on s’efforce de préserver.

L’important, c’est de s’entraîner chaque jour à voir avec des yeux neufs.



 

mardi 6 février 2024

Cet instant...

Cet instant, c’est le tremblement et le friselis du petit vent du sud. C’est une délicatesse de la nature où  la brise est complice, elle ébouriffe un peu la plume végétale. Il y a du soleil, le ciel est immense ; l’air est transparent comme un lac de montagne.

Il y a du monde en prairie. Les têtes floconneuses penchent leurs têtes d’aigrettes. Elles attendent leur cours de parachutisme. Elles prennent le large. Un souffle léger et c’est, tout à la fois, la fragilité, l’éphémère, la vie …



 

lundi 5 février 2024

Matinal...

Passent les jours, passent les années, les champs  d’été ondulent comme nos vies. Dans la cuisine silencieuse, c’est toujours les vacances. Une tasse est posée sur la table, elle fume… Volutes paresseuses et odorantes déposant sur la nappe de facture campagnarde et tachée une buée d’arabica.

Dans un coin, patte à patte, le chat s'éveille, tâtant précautionneux, l’or fondu des carreaux de grès.

Au plafond, on devine que les mouches s’invitent pour la journée. L’escalier grince. Là-haut, un lit gémit… Dans le jardin, le pommier trémule et se paye le luxe d’une ombre sur la terrasse.

Un matin comme ça,  on se souvient des couleurs criardes  du marché, on renifle les parfums de blé mûr… On contemple amusé la sarabande des merles et leur bonheur frénétique d’être des oiseaux… On se souvient avec tendresse de la mélancolie légère des dimanches de l’enfance.  La lumière d’ici se caresse du bout du pinceau lorsque les pierres violines se font dentelles.

Pas besoin  de tumulte, nous sommes au-dessus des frayeurs et l’ ’histoire pour être simple n’en est pas moins belle. Peu importe les jours, laissons là les années.

Il va faire très beau…



 

samedi 3 février 2024

Dis-moi Coucou ?




Février est encore bien loin  de  rendre  son âme grise  au diable. Les chemins creux attendent encore  des jours meilleurs… 

Un peu comme  lorsque  nous visitons une maison inconnue, l’hiver,  fait son mystérieux et  invite pourtant à parcourir les monts. Le Steenmeulen brandit ses longs et maigres bras au pied des Récollets. Il attend que le souffle de la mer du nord se fasse plus doux pour lui tourner la tête. Non loin de là,   se trouve  le lieu-dit « Le Coucou », qui vit très bien pour l’heure  sans en entendre chanter un seul. Il est encore  bien trop tôt pour annoncer le printemps, l’inauguration n’est pas pour cette semaine.

Lorsque je rencontrerai ce plumeux opportuniste  que lui dirais-je sous le doux soleil d’une nature balbutiante? Encore un printemps, encore un chemin…

 Retrouvant la vieille sentence oubliée, parlant la langue de Compère Goupil dans le Roman de Renart, je lui demanderai « Coucou des bois, coucou des champs, coucou des houblonnières. Argarde dans ton livre. Combin qu’j’ai d’temps à vivre. Si te l’sais, dis-moi lu. Si te l’sais pas, apprends-lu. Ou ben j’te frais pende. A la pus haut’branche. »

Rassure-toi mon petit ami ailé, je ne te demanderai rien d’autre que de pousser ton cri dans le creux des bosquets. Comprenne qui voudra, avec ou sans nous, la saison passera. Vent glacial ou pâle soleil, vent du nord ou roses nuées, non loin du lieu-dit « Le Coucou » tournera les longs bras maigres du Steenmeulen et son tic-tac éternel. 

Au creux de l’après-midi d’un  février naissant, je lis quelques mots de ce  vieux compagnon qu’est Maurice Carême, celui que l’on qualifie parfois de poète des enfants comme si c’était là une indignité… Les poètes sont des enfants qui écrivent pour des ombres s’efforçant de ne pas oublier d’avoir été d’idéalistes rêveurs…

Comprendrai-je jamais…


Comprendrai-je jamais ici

Pourquoi je regarde le ciel,

Donne rendez-vous à la lune,

Érige  des tours de Babel

Alors que je reste perplexe

Devant une chauve-souris

Qui met un accent circonflexe

Sur la coupole de la nuit ?

Un oiseau chante, un moulin cliquette et grince, intemporels métronomes de la portée sur laquelle  j’écris. Anodine et imperceptible mélodie qui rythme les pas de ma petite vie. Ma route sinueuse toute en bifurcations, en haltes et en rencontres. Dis-moi Coucou des champs où me mène le sentier ?


 

jeudi 1 février 2024

Lieux non communs...

 


 Toute la subtilité de la démarche est de ne jamais s’accaparer des lieux que l’on traverse. La bonne pratique est de laisser les atmosphères vous imprégner, laisser le paysage s’emparer de votre  petite personne.  De toutes les façons, on ne laisse que d'infimes traces de notre passage -  à  la  condition de ne pas se comporter comme un sagouin - mieux vaut  garder à l’esprit  que nous ne sommes que des invités  et que nous  restons très peu de temps .
En habitant la nature, arrive un  moment où la nature vous habite et chaque minuscule détail devient alors sujet d'étonnement. Voici  peut-être encore  une nouvelle explication de ce que  certains appellent la foi. Après bien des saisons, j’ai la ferme et définitive  conviction  que la foi libère alors que la croyance enferme.
La mesure de l'âge donne l’occasion de  cultiver cette naïveté des choses à  l'écart du monde et du vacarme. Cette étonnante  découverte journalière :   la fragilité de l'ensemble où rien n'est anodin, sans angoisse et en pleine conscience de la dualité entre être et avoir été,  la clé de toute la voûte…
C'est une philosophie saine d'aimer la vie comme l'expliquait Sylvain Tesson à  France Inter pour présenter son livre  : "Noir" :
"... c'est la même chose parce que la mort c'est la vie, et la vie c'est la mort. Si nous ne mourrions pas la vie n'aurait pas de valeur. La beauté de notre existence tient dans son caractère éphémère. On sait que c'est bref, tout de même. On n'aimerait pas trop que ça s'arrête. Mais c'est parce que la vie va s'arrêter qu'il faut l'aimer et qu'il faut la dévorer avec appétit. Je ne vois pas tellement de différence entre l'Himalaya, la beauté du monde, la montagne, l'exaltation vitale et la certitude qu'on va mourir. C'est au contraire un appel qu'il faut absolument avoir à l'esprit. Il ne faut jamais l'oublier."(Sylvain Tesson).
Il a parfaitement raison Sylvain,  parcourir les forêts profondes et les océans  immenses et s'extasier un peu plus chaque jour sur la chance qui nous est donnée,  traverser cette vie si terriblement belle…
"Tu trouveras bien plus dans les forêts que dans les livres."
Bernard de Clairvaux 



Au commencement…

Un bruit se fit entendre dans le sous-bois, peut-être était-ce une branche. Son craquement sec et sonore piqua la curiosité de l’animal. Pui...