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jeudi 7 juillet 2022

Correspondance croisée, Istanbul - Los Angeles.



Galata, 16 mai.
De la fenêtre, j’observe les mouvements alanguis des branches d’un cyprès séculaire. Il est constellé d’oiseaux. Dans le silence des ruelles de Tophane, les longs aboiements des chiens de Galata s’élèvent, mélopées lancinantes et farouches dans le treillis serré des venelles obscures.
Il règne ici  une douce odeur poivrée, capiteuse que la marée emporte parfois sur les hauts fonds. Les eaux de Marmara sont nimbées d’or et d’ombre, elles charrient toujours la passion, les espoirs. L’ombre des minarets se penche sur les lumières des quartiers insomniaques. L’heure de la sieste donne des envies de fuite…

Union Station, 28 juillet.

Elle est érigée devant nous, la cathédrale dédiée à la gloire éternelle de la sainte Trinité : Southern Pacific Railway. Elle coche d’une croix géante la perspective bancale, Olvera Street… 

Pavée de faïences colorées, ce n’est pas une gare ordinaire dressée dans la cité, c’est un décor Hollywoodien. Avec ses figurants et ses esclaves hypnotisés par la lumière brute de l’acier luisant sur les rails. Aucun prodige ne peut les délivrer du charme de la Cité des Anges. Lorsque la grisaille polluée de la Plazza se dissipe, les fauteuils profonds de moleskine voraces avalent les nababs matinaux, terrassés par l’ennui, usés jusqu’à la corde. Les taxis foncent, immuables, sur le boulevard du temps…


Quartier de Pera, 10 novembre.

Comme un serpent, un long halo de miel s’insinue entre les terrasses fauves qui fument doucement. L’hôtel est silencieux… Les murs de peluche rouge saignent dans le couchant du quartier de Pera. C’est déjà mardi qui s’en va ou bien un autre jour qui te donne des illusions d’éternité. Il y a l’odeur de l’anis, le grésillement du narguilé, des souvenirs enfumés dans le regard des autres . Il y a des femmes brunes et de très vieux marchands. Des musiciens dorment devant des spectateurs usés par le voyage. Une nuit de plus se pose et borde l’enfer dans ses replis soyeux.


Route 66 (Mother Road), 22 novembre.

Le matin succède à la nuit sur la mère de toutes les routes. Le chuintement des pneus susurre un air hypnotique à mes oreilles. Menton râpeux, regard serein, j’arrive dans pas longtemps au comptoir des naïfs. À l’embranchement South Main Street, des fantômes lèvent la main… Je hume l’odeur du vent comme un maigre coyote, j’ai fait provision de courbatures pour la semaine. Les ombres s’allongent, là-bas, vers Santa Monica, sur les traces de Jack le Céleste. Tout au bout du chemin , en pèlerinage…


Quartier Bebeck, 15 décembre.

J’ai devant  les yeux les remous du Bosphore qui scintillent, libérés. Après la prière de l’après-midi, je bois du thé ardent avec le marchand de lampes. Istanbul est  comme un songe en pointillés. Les filles, ici,  portent un anneau au nombril… J’ai une chambre blanche dans le quartier Bebeck. J’ai devant  les yeux le reflet des yalis,  vieillis, décolorés, fanés, flétris. Cent poèmes oubliés de bois peint et vernis. Avant la prière du soir, je bois le raki… Seul, « Lait de lion », solitude fleurie. Istanbul s’endort, Istanbul s’estompe. Demain, j’irai peut-être, déambuler longtemps sous l’ombre fraîche et l’ambiance désuète de Topkapi. J’ai devant  les yeux les ombres d’avant  qui s’éloignent dans les feux de midi.







 


 

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Au commencement…

Un bruit se fit entendre dans le sous-bois, peut-être était-ce une branche. Son craquement sec et sonore piqua la curiosité de l’animal. Pui...